Mortiferum

Scoop à la Une, l’homme est un animal mortel. L’homo sapiens sapiens, espèce vieille d’à peine 300 000 ans, fait partie du vivant. Quand tout le monde parle de l’après, voilà la seule leçon à retenir. Une leçon d’humilité.

Le poids de l’histoire

Plusieurs millénaires d’un monothéisme autoritaire et viril ont façonné l’inconscient collectif. Plaçant notre espèce au centre d’un univers perçu comme une ressource.

Pour rappel, en politique, le premier candidat écologiste à la présidentielle, René Dumont, s’est présenté en 1974. La remise en question du modèle de croissance occidental est historiquement très récente. Parce qu’elle nous concerne tous, cette prise de conscience dépasse les clivages. Jacques Chirac, nourri par une passion pour les peuples premiers auxquels il a consacré un musée, a senti cette urgence monter. Son propos, « la maison brûle » marque cette prise de conscience. Cet homme a tendu l’oreille aux voix qui s’élevaient. Il leur a donné un écho. Du même parti, Nicolas Sarkozy a essuyé d’un revers de main toutes les interrogations et les doutes, au nom de la sacro sainte croissance. Une forme de croissance myope, incapable de proposer un modèle qui pense sur le long terme pour ne privilégier que le court terme et les intérêts particuliers. Son mépris pour ce qu’il appelle les bobos est symptomatique.

Dans le monde animal, régi par les lois naturelles, les antilopes oscillent entre baisser l’encolure pour brouter les végétaux, et dresser la tête pour prévenir l’attaque du félin. Tous les prédateurs sont astreints à une règle simple, tuer, ou disparaître.

Chez l’homme moderne, les blancs de poulet, on les chasse sur les rayonnages des grandes surfaces. Prédateur à carte bleue, un mode de consommation insatiable a fini d’achever un rapport harmonieux au vivant.

Réintroduire la notion de cycle

En cherchant à oublier que nous étions mortels, nous avons perdu un rapport sain et équilibré au vivant, à commencer par un rapport à la terre qui est soit ignorée, soit réduite à une ressource à exploiter.

Pour toutes les mesures à prendre pour ce qu’il est convenu d’appeler l’après, il faut réintroduire la notion de cycle dans nos actions. Arrêter de penser que nous sommes au centre de l’univers, aux manettes d’une trajectoire appelée progrès ou croissance selon le contexte. Cette attitude va nous mener dans le mur de face, et à pleine vitesse. Avec cette crise sanitaire, nous ne faisons que nous érafler un peu sur le crépis, de biais.

C’est en se rappelant que nous sommes mortels, comme l’antilope aux aguets, et en l’acceptant, que grâce à la nécessaire humilité qui en découle, la vie reprendra sa valeur, que des équilibres souhaitables se mettront en place.

Notre prédateur est un virus dont nous sommes globalement responsables de la propagation. Cette idée à moins de superbe que la beauté sauvage de la prédation dans le monde animal. Elle peut avoir les mêmes effets en nous faisant ravaler notre arrogance millénaire.